Chronique de censures assumées
S’il lui est arrivé de s’impliquer lui-même pour faire à des journalistes ou des éditeurs « une proposition qu’ils ne pouvaient pas refuser », façon Don Vito Corleone dans Le Parrain de Coppola, ce n’est même plus la peine aujourd’hui… Les patrons de presse qui sont généralement des patrons d’industrie proches de Nicolas Sarkozy se chargent très bien eux-mêmes de contrôler les éventuels “dérapages” des rédactions de leurs media. Il leur arrive même d’aller au devant des désirs du président, comme lorsque Paris Match a offert l’été dernier aux Français une bonne tranche de rigolade en gommant sur une photo ses bourrelets présidentiels.
En août 2005, lorsque Paris Match fait sa “une” sur l’escapade amoureuse de Cécilia avec le publicitaire Richard Attias, Nicolas Sarkozy reçoit un coup de fil de son “frère” Arnaud Lagardère, actionnaire de référence de l’hebdomadaire. Le Canard avait alors rapporté les propos de Sarko : « Je croyais qu’Arnaud était un ami. Je ne m’attendais pas à ça de sa part. Il m’a appelé jeudi (le jour de la sortie de Paris-Match) pour me dire qu’il était désolé. Je lui ai fait remarquer qu’il aurait pu interdire cette publication. Il m’a assuré qu’il n’était pas au courant, qu’il a découvert le journal comme tout le monde. Soit il est nul, parce qu’il aurait du être au courant, soit il est malhonnête parce qu’il savait ». En juin 2006, Lagardère virait Alain Génestar, quand bien même celui-ci avait tenté de se racheter, comme l’avait rapporté le Canard en décembre 2005, en gommant une phrase lors d’une interview de Yannick Noah : « Une chose est sûre : si jamais Sarkozy passe, je me casse ! ». En pure perte visiblement…
En octobre 2005, les émissions “Tout le monde en parle” de Thierry Ardisson, et “On a tout essayé”, de Laurent Ruquier, toutes deux produites par la boîte de production d’Ardisson pour France 2, décommandent au dernier moment le passage prévu des auteurs du livre “Nicolas Sarkozy ou le destin de Brutus”, au motif que « le livre pose des questions sans apporter de réponses » (sic) et qu’il était « impossible de trouver des contradicteurs à leur opposer » (re-sic).
Ironie de l’histoire, le livre cherchait précisément à lever la “relative omerta” qui entoure Nicolas Sarkozy, de pointer du doigt la brutalité verbale avec laquelle il traitait ses opposants. Ou encore le peu de temps de parole accordé auxdits opposants. Sans oublier ses directives visant à faire en sorte qu’il se produise un événement par jour autour de lui, afin que l’on ne parle que de lui.
Ce même mois, un autre décryptage de ses discours, sous forme de documentaire cette fois, intitulé “Sarkozy mot à mot” et réalisé par un journaliste de France 2 et une autre du JDD, est annoncé sur France 2. Il n’y sera jamais diffusé, pas plus que sur France 5, au motif que, après avoir été placardisé des mois durant, il était “daté” lorsqu’il s’est agi de le diffuser.
A défaut de le voir à la télé, on le découvrit sur internet, mais pas longtemps : DailyMotion, la plateforme française de diffusion de vidéos qui l’hébergeait, l’a finalement “retiré pour cause de non-respect des conditions d’utilisation”. Séverin Naudet, son “directeur des contenus et de la communication”, chargé des relations presse pour Hervé Gaymard en 2003 et 2004 et conseiller au ministère de la Communication jusqu’en 2006, a depuis rejoint le pôle communication de François Fillon en tant que conseiller technique chargé de la presse. Son poste chez Dailymotion fut quant à lui attribué à l’ancien chef du pôle multimédia au ministère de la Culture…
Surtout pas d’émeutes en novembre 2005
Nicolas Sarkozy sait aussi s’investir personnellement lorsque l’affaire lui semble grave. Alors ministre de l’Intérieur, le Canard Enchaîné avait révélé comment il avait convoqué, en novembre 2005, Vincent Barbare, responsable des éditions F1rst et l’avait “menacé de foudres judiciaires et variées” s’il publiait la biographie de Cécilia Sarkozy signée Valérie Domain, une journaliste de Gala, alors même que la promotion du livre était bien entamée : un tirage annoncé de 25.000 exemplaires, des préventes sur internet, des exclusivités sur RTL, France 3… Gala dénoncera même, dans son édito, “cette méthode arbitraire qui porte un nom : la censure”. Les menaces ont été prises très au sérieux par l’éditeur, qui imposa à l’auteur, Valérie Dolmain, de « romancer » son livre.
Toujours en novembre 2005, le cabinet de Nicolas Sarkozy demande à la direction de Canal + une cassette de l’émission “Nous ne sommes pas des anges”, où une invitée à osé dresser un parallèle entre le couvre-feu annoncé par Dominique de Villepin la veille et celui de Papon en octobre 1961, dénonçant « la gestion coloniale de cette crise » des banlieues. Canal + exige de la maison de production, filiale de Lagardère, qu’elle invite deux jours plus tard un maire UMP afin de contrebalancer les propos outranciers.
Deux jours plus tard, la direction de France 2 retire de son site web le reportage de son JT où l’on voyait des policiers tabasser des jeunes des cités afin, déclare Arlette Chabot, de ne « pas tomber dans la surenchère [...] au risque d’envenimer les choses à la veille d’un week-end à risque ».
Nicolas Sarkozy décrochera d’ailleurs son téléphone afin de remercier Robert Namias et Arlette Chabot de leur discrétion : à l’instar de France 3, elles ont en effet levé le pied de leur couverture des émeutes de banlieues, et ne donnent plus, ni chiffres ni images des voitures incendiées. En mars 2007, accueillant Nicolas Sarkozy dans son émission “A vous de juger”, Arlette Chabot évitera soigneusement de poser quelque question que ce soit à Nicolas Sarkozy à propos de la polémique soulevée par Le Canard Enchaîné au sujet des frais de réfection “offerts” par le promoteur immobilier qui lui avait vendu son appartement de Neuilly.
En décembre 2005, Plantu, le dessinateur-vedette du Monde, reçoit un courrier de Nicolas Sarkozy des mains d’un policier en tenue, après la parution d’un dessin agrémentant l’alors ministre de l’Intérieur d’une petite mouche, petit “détail” qui accompagnant d’ordinaire les caricatures de Jean-Marie Le Pen. Le lendemain, Plantu lui accole trois mouches. Depuis, Sarkozy, qui avait déclaré préférer “un excès de caricature à un excès de censure” au moment de l’affaire des caricatures de Mahomet parues dans Charlie Hebdo, s’est plaint auprès de la direction du Monde pour avoir été caricaturé en petit chien, “en roquet”, ou encore pour avoir été affublé du brassard “I. N.” (pour “Identité Nationale”).
Certains savent ne pas prendre le risque de voir débouler un coursier porteur d’une missive de ce genre… En février 2006, le Canard révélait comment Jean-Pierre Elkabbach, patron d’Europe 1, n’avait rien trouvé de mieux que de demander par téléphone à Nicolas Sarkozy son avis sur le journaliste chargé de suivre la campagne de l’UMP. Celui-ci n’y voyait rien à redire non plus : « Bien sûr. (…) J’ai été ministre de la Communication. Je suis ça de près, ça fait partie du travail politique. (…) Si vous saviez. Il n’y a pas qu’Elkabbach qui fait cela… ».
Mieux vaut ne pas oublier que Sarkozy a un oeil partout : en août 2006, ce dernier passe un savon à un rédacteur en chef de TF1 pour un reportage, jugé trop complaisant, sur les sans-papiers de Cachan.
En septembre 2006, un sondage commandé par La Tribune sur les préférences « en matière économique et sociale » des Français révèle que 54% des sondés font confiance à Ségolène Royal, contre 49% à Nicolas Sarkozy. la “une” du quotidien, qui devait titrer « Royal en tête sur l’économique et le social », est réintitulée « Économie : les Français se montrent moins pessimistes », le passage sur la candidate du PS étant soigneusement caviardé. Faut-il préciser que La Tribune appartient à Bernard Arnault, témoin au mariage de Nicolas et Cécilia ?
Suivre de très près ce que font les journalistes, c’est logique lorsque l’on est un homme politique qui aspire à la magistrature suprême. S’énerver du traitement médiatique s’il est négatif, cela peut se comprendre. Mais parvenir à influer sur ce traitement médiatique à ce point, c’est plus inhabituel. Le réseau d’amitiés avec les plus grands patrons de presse tissé par Nicolas Sarkozy lorsqu’il était maire de Neuilly l’y aide grandement. Ainsi, lorsque Laurent Bazin, journaliste de iTélé, relate en décembre 2006 sur son blog les menaces à peine voilées exercées par Nicolas Sarkozy sur les journalistes de la chaîne, à l’occasion d’un déjeuner « off » organisé par la rédaction de sa chaîne, la direction de celle-ci lui demande de retirer cet article.
Elections : silence dans les rédactions
Sarkozy ira même jusqu’à juger en direct le travail des journalistes : lors de son passage dans le journal de France 3 Nord Pas-de-Calais, en mars 2007, il déclare ainsi “J’ai déjà vu des reportages malhonnêtes, mais celui-ci… félicitations”.
Ce même mois, il menace carrément de virer la direction de France 3, accusée de ne pas l’avoir traité avec suffisamment d’égards : comme l’avait alors révélé le Canard, il n’avait pas bénéficié d’une loge personnelle pour préparer son maquillage et son passage à France Europe Express.
Peur de déplaire au futur prince ? En avril 2007, les éditions Michalon avaient quant à elles refusé au magistrat Serge Portelli la publication de son dernier livre sur le bilan Sarkozy en tant que ministre de l’Intérieur et les dramatiques perspectives en matière judiciaire s’il venait à être élu. Motif : le livre était mauvais. Mal écrit ? Mal documenté ? A côté de la plaque ? On ne le saura jamais. L’auteur, brillant juriste et contradicteur efficace de Nicolas Sarkozy dans l’émission Ripostes du 10 décembre 2006, a trouvé un autre éditeur et le livre est paru. Pas si mauvais visiblement…
Le fait que Yves Michalon soit un ami personnel du candidat UMP à la présidentielle n’avait évidemment rien à voir avec le refus du livre par sa maison d’édition.
On se souvient également de la tirade de François Bayrou, évoquant des pressions exercées par Nicolas Sarkozy, dans l’entre-deux tours des présidentielles de 2007, pour que son débat télévisé avec Ségolène Royal n’ait pas lieu : « Je n’en ai pas la preuve mais j’en ai la certitude ». Il enfonçait le clou un peu plus tard : « Lorsque j’ai tenu une conférence de presse mercredi j’ai parlé de la part de Nicolas Sarkozy d’intimidation et de menace. C’est exactement là où on en est ». Et forçait même, en direct, l’animateur dudit débat à valider du bout des lèvres sa théorie.
Ses opposants, et notamment François Bayrou, ont plusieurs fois dénoncé la sureprésentation médiatique dont faisait l’objet Nicolas Sarkozy. Mais il y a plus subtil que les Unes complaisantes : la « coupe légère ». Un nouveau concept journalistique inventé par Patrick Poivre d’Arvor, présentateur vedette de TF1 qui avait d’ailleurs débouché le champagne dans les locaux de la chaîne le 6 mai 2007.
Après le deuxième tour, les discours de François Bayrou et de François Hollande ont été amputé de leur dernière minute. « Une coupe légère », pas bien grave donc, selon PPDA.
Sur France 2, le journalisme nouveau se pratique autrement. Plus finement. Lorsque l’on fait un reportage sur l’élection à Bordeaux, on cite quatre fois le nom d’Alain Juppé (en ballottage) et pas une seule fois celui de sa concurrente qui devient “la candidate socialiste”. Il faut savoir lire pour découvrir son nom qui apparaît deux fois écrit à l’écran.
L’intégration dans certains reportages télévisés d’images fournies par la société de production ETC suscita bien quelques remous à France Télévisions, mais pas de quoi fouetter un chat. La société ETC, chargée par Nicolas Sarkozy de filmer ses meetings de campagne, bénéficiait en effet de conditions privilégiées pour tourner des images du ministre-candidat, notamment une caméra réalisant des travellings spectaculaires, tandis que les journalistes télé, parqués sur les côtés de la salle, n’avaient que de mauvais angles de vue. Les journalistes CGT de France Télévisions protestèrent contre les « images de propagande » d’ETC qui sont parfois reprises dans les journaux télévisés, sans mention du fait qu’elles viennent du staff de campagne du candidat.
Déterminer d’où vient le vent et où il peut les porter est une activité difficile mais pas impossible pour les rédactions. A Elle, autre titre de la galaxie Lagardère, les article très positifs sur Ségolène Royal se sont multipliés au début de la campagne. Après l’élection, l’objet de toutes les attentions est désormais Cécilia Sarkozy. Les limites du ridicule sont parfois allègrement franchies lorsque -par exemple- le journal compare sur plusieurs pages, en mai 2007 et photos à l’appui (mais ayant un effet contraire à celui souhaité), la désormais première négociatrice de France pour les prises d’otages, à Jacqueline Kennedy.
Côté ciseaux magiques pour protéger Cécilia, le Journal du Dimanche avait donné le ton peu après le deuxième tour des présidentielles. Un article expliquant qu’elle n’avait pas voté au premier tour a été mis à la trappe sur demande expresse d’Arnaud Lagardère (encore). Que sa propre femme n’ait pas jugé utile de voter pour Nicolas relevait, paraît-il, du domaine de la vie privée. Que cela puisse éclairer ou pas l’électeur lambda importait peu à ce patron de presse.
Autre groupe, autre patron prévenant. Vincent Bolloré, qui devait offrir des vacances royales sur son yacht au président fraîchement élu, avait pris soin, toujours en mai 2007, de faire sucrer un vilain article hongrois -repris de Courrier International par son gratuit Matin Plus- insinuant que la police française avait eu un comportement peu amène avec un groupe de musiciens roms à Roissy, et se permettant même de rajouter qu’“il y a trente ans, à l’époque brejnévienne, les autorités soviétiques agissaient de manière plus démocratique que ne l’ont fait, il y a quelques jours, les fonctionnaires français”.
En mai, fais ce qu’il te plaît
Le ton sera donné le soir même de l’élection de Nicolas Sarkozy. Parmi les invités – triés sur le volet – de la petite sauterie au Fouquet’s, célébrant l’accession au pouvoir, on trouve une kyrielle de propriétaires de media. Entre autres : Bernard Arnault, Martin Bouygues (TF1), Serge Dassault (Le Figaro), Alain Minc (Le Monde), Albert Frère (M6). Et un journaliste : Nicolas Beytout (Le Figaro).
La complaisance journalistique pour le président peut parfois se muer en une sorte de protection rapprochée. Lorsque la polémique enfle sur les vacances de Nicolas Sarkozy offerte par Vincent Bolloré au lendemain de son élection, le Figaro publie un article expliquant à la France d’en bas que tous les présidents se sont offerts des vacances luxueuses. L’auteur de l’article n’est autre que Anne Fulda, avec qui Nicolas Sarkozy s’était consolé du départ de Cécilia à New York, où elle vivait une romance avec Richard Attias. Pas rancunière et prévenante…
Le silence est d’or, dit-on. C’est sans doute pourquoi aucun journalisme ne remet en question certaines énormités du nouveau locataire de l’Elysée. Les vacances de Nicolas Sarkozy sur le yacht de Vincent Bolloré provoquent une toute petite et courte (le temps d’en déclencher une autre et ainsi de suite) polémique. Pour se défendre, le Président indique que Vincent Bolloré n’a « jamais travaillé avec l’Etat ». Toute la presse reprend en coeur cette information. Une simple lecture du Bulletin des annonces légales obligatoires démontre pourtant qu’il s’agit d’un mensonge grand comme une talonnette présidentielle, mais personne ne tique.
Pas plus lorsque le président évoque son bilan de chef de la police : “En quatre années de ministre de l’Intérieur, il n’y a pas eu une seule bavure”. Silence des journalistes qui l’interrogent. La Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité n’est pas de cet avis, pourtant : « Depuis le début de son activité, la Commission a enregistré 419 saisines. Au 1er septembre 2006, 129 dossiers restent à instruire. Son activité est marquée par une augmentation continue, passant de 19 saisines enregistrées en 2001 à 40 en 2002, à 70 en 2003 puis à 97 en 2004, et 108 en 2005. En cinq ans, le volume d’activité de la Commission a donc été multiplié par cinq. La progression semble se confirmer puisque entre le 1er janvier et le 1er septembre 2006, elle avait déjà reçu plus de 85 saisines”.
(…)
« Dans de nombreux dossiers, elle a relevé de la part des fonctionnaires des irrégularités dans les pratiques professionnelles : usage indu de la coercition (conduite au commissariat sans procédure ultérieure, placement en garde à vue injustifié, parfois en l’absence évidente d’une infraction, durée de garde à vue excessive) ; utilisation abusive des mesures de coercition (fouille de sécurité systématique et menottage serré contraires aux prescriptions de la circulaire ministérielle du 11 mars 2003 relative au respect de la dignité des personnes gardées à vue) ; emploi exagéré de gestes techniques professionnels d’intervention (GTPI) aboutissant à des blessures (notamment dans le cadre de reconduites à la frontière). Certains dossiers ont fait état de blessures graves et de séquelles irréversibles (traumatisme crânien, fractures de bras, du nez, de dents cassées, tympan perforé, lésions testiculaires), et deux affaires ont concerné le cas d’étrangers décédés dans l’avion à la suite de gestes de contrainte excessivement prolongés ».
Etc.
Connu pour être un tantinet rancunier (il avait par exemple promis « d’accrocher à un croc de boucher » les responsables de son implication involontaire dans l’affaire Clearstream), le président incite visiblement les responsables des rédactions à lisser… A éviter les problèmes, les conflits avec lui. Exit donc les émissions un peu trop impertinentes. Arrêts sur Images de Daniel Schneidermann sur France 5 ou La bande à Bonnaud sur France Inter semblent ainsi avoir fait les frais de la tendance au lissage à l’occasion de la nouvelle grille de rentrée 2007-2008.
Toujours en mai dernier, le Parisien décidait carrément de passer à la trappe un dossier consacré à l’influence de Sarkozy sur les médias : on y voyait une infographie rappelant que Lagardère contrôle 25% du groupe Amaury. Le quotidien préféra finalement publier des photos de Ségolène Royal de retour de Djerba, et de Nicolas à Brégançon. En août, c’est TF1 qui décide de passer à la trappe une interview exclusive, prévue pour être diffusée dans l’émission 7 à 8, de l’un des frères de Rachida Dati, récidiviste qui venait d’être condamné à un an de prison pour trafic de drogue.
Les médias traditionnels ne sont pas les seuls concernés. La SACEM avait ainsi demandé aux Inrocks, en janvier 2006, qu’ils retirent de l’une de leurs compilations la chanson “Tous les tizenfants” du collectif La Voix Off, détournement d’une interview de Sarkozy, au motif que “le montage des propos de Nicolas Sarkozy rappellerait certains crimes commis par les nazis, comme la sélection d’êtres humains ou leur suppression pour inutilité”. L’ex-chanteur du groupe NTM, Joey Starr, aurait lui aussi vu l’une de ses chansons retirées, en octobre 2006, de son album au motif que Nicolas Sarkozy luttait alors aux côtés des majors contre les téléchargeurs, et que Sony, sa maison de disque, ne voulait pas l’offusquer avec ce titre délicatement intitulé “Sarko tiens ta femme et tu tiendras la France”.
En juin 2007, Nicolas Sarkozy qui tient beaucoup à l’image qu’il véhicule dans les media se retrouve à la une du Web avec une vidéo qui n’aura pas la même publicité à la télévision française. Il s’agit d’un extrait d’un journal télévisé belge dans lequel le journaliste s’interroge sur ce qu’à bien pu boire Nicolas Sarkozy au G8 vu son état lorsqu’il se présente à une conférence de presse dans un état très particulier.
Début septembre 2007, c’est Christine Albanel qui prend la plume pour s’offusquer de l’éditorial “particulièrement déplacé” de la plaquette 2007-2008 du théâtre du Granit à Belfort qui évoquait, avec humour, “les conséquences profondes, et probablement désastreuses, sur le cours de nos existences” de l’élection de Nicolas Sarkozy à l’Elysée : “J’ai par exemple découvert que mon voisin, avec lequel j’entretenais des rapports tout juste polis, n’a pas voté pour Nicolas Sarkozy. Du coup, non seulement ça simplifie les questions de clôture et de mitoyenneté, mais en plus, s’il a besoin, je suis prêt à lui garder son chien”.
Mi-septembre, c’est une lettre manuscrite que Nicolas Sarkozy porte sous le bras à la sortie du conseil des ministres qui déclenche une petite discussion digne de la dictée de Pivot. Le magazine Choc (Lagardère) prévoit initialement de publier une double page sur le contenu amusant de cette missive. Mais se ravise au dernier moment. « J’ai l’impression de ne pas t’avoir vu depuis une éternité et tu me manques. Jeudi on part faire notre virée à Essaouira pour mon (illisible). Mais j’aimerais bien réussir à te voir la semaine ou le week-end suivant. Millions de Besitos. », peut-on lire sur la lettre. C’est moi qui l’ai écrite, explique après la polémique et les interrogations de la presse, Isabelle Balkany. Et elle l’adressait à Cécilia. Mais les puristes rappellent que dans ce cas, « vu » devrait être écrit « vue ». Mais à quoi pourrait bien servir l’orthographe pour une droite décomplexée qui estime par la voix du Premier ministre et de la ministre de l’Economie qu’il n’est plus nécessaire de perdre du temps à réfléchir ?
On aurait tort, pour autant, de se contenter de dénoncer les relents de censure et d’auto-censure liées à Nicolas Sarkozy. Il lui arrive parfois de dire du bien de journalistes, et même d’en embaucher certains, telles Myriam Lévy, qui avait couvert la campagne de Ségolène Royal pour le Figaro, et qui s’est retrouvée conseillère en communication de François Fillon, ou encore Catherine Pégard, qui avait couvert la campagne de Sarkozy pour Le Point, et qui a été nommée conseillère du nouveau président. Nicolas Sarkozy s’était aussi illustré en prenant son téléphone pour défendre Karl Zéro lorsque la direction de Canal + voulait s’en séparer. C’est aussi lui qui, le premier, annonça l’arrivée d’Harry Roselmack au JT de 20 heures de TF1, laissant presque entendre que c’était lui qui en avait eu l’idée. Mais il a fait encore mieux : c’est en effet l’Elysée qui a annoncé l’arrivée de Laurent Solly, alors directeur de campagne adjoint de Nicolas Sarkozy, à la direction de TF1. On n’est jamais mieux servi que par les siens. D’ailleurs, un mois plus tard, en juin, en introduction d’une interview que Nicolas Sarkozy allait lui accorder, PPDA présentait son JT depuis les salons de l’Elysée.
La censure ne se fait pas toujours directement « du producteur au consommateur », comme dit la pub. En février 2008, le groupe Lagardère a demandé aux Relay, les kiosquiers des gares de masquer le haut des affiches vantant la « Une » de Courrier Inetrnational. Le « frère » de Nicolas Sarkozy, comme il aime à se définir, avait cru déceler un crime de lèse-majesté dans l’accroche suivante : « vu de Madrid Sarkozy, ce grand malade ». Il s’aghissait en fait d’un article de El Pais, quotidien de référence espagnol évoquant les problèmes d’égo du président français. L’article décrivait en effet unn homme malade de son égo, atteint à un point qui ne se soigne plus. Exit donc la partie haute de l’affiche dans les kiosques Relay…
Cette décision abracadabrantesque faisait suite à un refus de la part de la régie publicitaire Metrobus d’afficher cette « Une » sur son réseau. Metrobus « compte le groupe Decaux et le groupe Publicis parmi ses principaux actionnaires », notait le site rue89.com avec un mauvais esprit qui fait souvent défaut au reste de la presse traditionnelle.
Dans la même veine (l’auto-censure), Paul Amar avait omis d’inviter dans on émission « revu et corrigé » sur France 5, le représentant du DAL, Jean-Baptiste Eyraud. La ministre Christine Boutin ayant fait comprendre à la production de l’émission qu’elle ne voulait pas débattre avec lui…
[...] quotidien de référence espagnol n’avait pas hésité à qualifier Nicolas Sarkozy de “grand malade“. Mental, s’entend. Comment peut-on en arriver là et surtout, peut-on encore tomber [...]
[...] Nicolas Sarkozy est un secret de polichinelle. Aporismes.com s’en était fait l’écho dans un long article sur le phénomène d’auto-censure (des journalistes) apparu avec l’élection de Nicolas [...]