Tu l’as vue ma grosse campagne de dénigrement (raciste et misogyne) ?
Avez-vous, comme moi, raté quelque chose ? Avez-vous vu la vaste campagne de dénigrement dans la presse et/ou de la part de la classe politique, contre la ministre de la Justice, Rachida Dati ? Une campagne immonde qui serait à la fois raciste (c’est à dire la dénigrant en raison de son origine ethnique) et misogyne (l’attaquant sur le fait qu’elle est une femme) ? Si vous avez des informations allant dans ce sens, merci d’écrire à Aporismes.com. Pourtant, cette supposée campagne est dénoncée à longueur de colonnes dans la presse depuis quelques jours. Le milieu politique n’est pas en reste et à droite comme à gauche, on martèle que cette campagne est indigne.
Belles déclarations qui ne présentent qu’un seul petit défaut. Cette supposée campagne raciste et misogyne n’existe pas. Comment la presse dans son ensemble et la classe politique ont-elles pu se laisser enfumer de la sorte ? Mystère. Si vous avez des idées, merci de nous écrire également.
L’artillerie lourde a été sortie par Dominique Sopo, président de SOS Racisme et militant socialiste qui indiquait il y a quelques jours dans Libération que « Rachida Dati est aujourd’hui la cible d’une « élite blanche » qui n’accepterait pas sa nomination au ministère de la Justice ».
Rien que cela.
« Je pressens que Rachida Dati paie d’être une ministre atypique, parce qu’elle est jeune, femme, et d’origine maghrébine. Malheureusement, ce profil crée des rancœurs au sein d’une élite française constituée d’hommes blancs de plus de 55 ans. Cette aristocratie républicaine attachée à ses privilèges défend son pré carré », martelait-il
Même craintes pour Patrick Gaubert, président de la Licra (Ligue contre le racisme et l’antisémitisme), et député européen UMP. Libération, toujours, rapportait ainsi qu’il pensait la ministre « victime d’une campagne injuste du fait de la consonance de son patronyme »
A gauche toujours, Libération cite Esther Benbassa, historienne du judaïsme qui dénonce : « Certains sites Internet de la diversité, et certains intellectuels venant des milieux de la diversité parlent d’elle comme d’une collabo ».
Ca se précise. Mais tout doucement… Quelques obscurs sites dont on tait les adresses et des « intellectuels » dont on tait les noms feraient partie de cette odieuse conspiration visant à dénigrer la ministre.
Bien entendu, le fait que cette polémique éclate au moment même où la ministre présente devant l’Assemblée le très controversé projet de loi sur la récidive est totalement fortuit.
Il y a fort longtemps, le KGB appelait cela une maskirovska. Et il était très fort dans ce domaine.
Nicolas Sarkozy avait pourtant habitué la presse à cette technique de la victimisation. Il est étonnant qu’elle ne remarque pas la similitude dans la méthode chez Rachida Dati qui est une élève appliquée des méthodes du président.
Durant des mois, le ministre de l’Intérieur, puis le candidat Sarkozy, a multiplié les coups d’éclat, les déclarations à l’emporte-pièce, livrant à la vindicte populaire (dont on sait combien elle repose sur l’intelligence collective et la rationalité) de nombreuses catégories de la population, décrétées tout à tour ou tout à la fois fainéantes, tricheuses et/ou profiteuses. Une fois la polémique (qu’il souhaitait) née de ses propos, Nicolas Sarkozy s’indignait des critiques à son encontre. Toujours sur la forme (on m’attaque) mais jamais sur le fond (ce que je dis, c’est le bon sens près de chez vous, donc non critiquable, Paulo le chômeur de “J’ai une question à vous poser” pense comme moi, c’est donc que j’ai raison). Cette technique est ultime. Elle pose à ses opposant le problème de la quadrature du cercle : soit on réagit (c’est ce qu’il souhaite et il gagnera au coup d’après en se posant en victime), soit on ne réagit pas (et cela lui laisse le champ libre pour se laisser aller à sa décomplexitude. Il gagne également…).
Tout le monde ne voit pas où est la conspiration anti-Dati
Il reste pour l’heure quelques résistants comme Mouloud Aounit, président du Mrap, qui, toujours dans Libération ne croit pas à une campagne de ce type contre Rachida Dati : « Rachida Dati fait l’objet d’une curiosité tout à fait normale et légitime compte tenu de la force symbolique qu’elle représente en tant que femme, issue de l’immigration, et d’un milieu populaire ».
Le président d’honneur de la Ligue des droits de l’homme, Michel Tubiana est également dubitatif dans Libération : « les « projets judiciaires » de la ministre, qui reviennent à l’Assemblée (…) méritent d’être critiqués car ils n’auront d’autre effet que de remplir les prisons. Sa méthode également, « totalement autoritaire ». « La Ligue a condamné tout cela. Si c’est une machine à critiquer sa politique qui est en route, j’y participerai, conclut ce responsable associatif. Si c’était en revanche une machine à la déstabiliser parce qu’elle est d’origine maghrébine, nous serions amenés à réagir en sens contraire. ». Mais tel n’est pas aujourd’hui, selon lui, le cas. ».
Il n’est visiblement pas venu à l’esprit des journalistes ou des politiques soudainement indignés que Rachida Dati pouvait être critiquée simplement parce qu’elle est la ministre de la Justice et qu’elle défend à ce titre un projet de loi que tous les professionnels jugent au mieux inefficace et contreproductif, au pire stupide.
Ni que le Canard Enchaîné (jamais nommé dans cette histoire) était dans son rôle lorsqu’il rapportait que le directeur et trois autres membres du cabinet de la ministre avaient démissionné, déprimés par son côté autoritaire.
De même que la presse, en général, est dans son rôle lorsqu’elle rapporte que des frères de la ministre sont poursuivis pour trafic de drogue. Qu’il n’y là aucune campagne raciste et misogyne.
Par ailleurs, la surexposition liée au poste (dans n’importe quel ministère d’ailleurs) est souhaitée par les politiques. Pourquoi se plaindre de ses effets si ce n’est en raison d’un manque de sagesse ? Lao Zi disait que « L’absence de désirs procure la quiétude ». A propos de ministère de la Justice… le même sage disait : « Plus les lois se manifestent, et plus les voleurs s’accroissent ». Pas con… Mais difficile à comprendre pour Nicolas Sarkozy ou les membres de son gouvernement. Car l’exemple vient d’en haut. François fillon disait “Notre pays a besoin d’un électrochoc, on n’a pas le temps de réfléchir, d’attendre, de prendre notre temps”. Lors de son discours devant les députés, la ministre de l’Economie, Christine Lagarde a regretté que la France soit « un pays qui pense » : « La France est un pays qui pense. Il n’y a guère une idéologie dont nous n’avons fait la théorie. Nous possédons dans nos bibliothèques de quoi discuter pour les siècles à venir. C’est pourquoi j’aimerais vous dire : assez pensé maintenant. Retroussons nos manches ». Le message est clair : cessez de réfléchir. En plus c’est dangereux.
Pour les gouvernants.